vendredi 10 décembre 2010

Thèse: La finance islamique et l'immobilier en France

Mémoire portant sur le fonctionnement particulier de la finance islamique régie par la loi islamique et qui se développe récemment en France dans le domaine de l'immobilier. (pdf)
Ecrit en 2008; 18500 mots; 17 sources; 14,95 €
Résumé:
Totalement inconnue du grand public il y a tout juste une décennie, la finance islamique accapare toutes les attentions depuis quelques temps. Forte d'une croissance à deux chiffres et de considérables avoirs, liés aux recettes pétrolières, cette nouvelle industrie financière suscite la curiosité du grand public et l'intérêt des professionnels et des gouvernements occidentaux. En Europe, la Grande-Bretagne est considérée comme le précurseur en matière de finance islamique. Comme son nom l'indique la finance islamique est une finance qui veut rester conforme aux préceptes de la charia, ou loi islamique.

I) Evolution et fondements de la finance islamique
II) Financements islamiques
III) Particularités et développement de la finance islamique
IV) Possibilités de développement de la finance islamique en France : cas du marché de l'immobilier
Extrait du document:
Existant depuis une quarantaine d'années, la finance islamique est un phénomène relativement récent et méconnu dans le monde occidental et en France. Au moment où certains appellent à une autre finance, plus éthique et plus responsable, la finance islamique qui refuse toute forme de spéculation ou de gains non basés sur une prise de risque
économique, peut se présenter comme une alternative possible et éthique à certains mécanismes de la finance conventionnelle.
L'abondance de liquidités chez les états du golfe persiques et l'hardiesse de la politique anglaise pour attirer ces liquidités, poussent les autorités françaises à vouloir adapter les systèmes fiscal et juridique aux produits liés à la finance islamique. Sans avoir de réel retour d'expérience sur le secteur, le marché de l'immobilier en France en financement islamique offre de réelles possibilités de développement et de croissance. L'intérêt
des musulmans de France est manifeste pour l'apparition de banque de détail dans l'Hexagone. L'intérêt pour un Etablissement bancaire de développer une activité de finance islamique n'est plus à démontrer. Les propos tenus récemment par Christine Lagarde devraient inciter les
banques françaises, qui disposent en finance islamique d'une réelle expertise acquise sur les marchés internationaux, à mener une réflexion sur le sujet et à lever les dernières réticences qui subsistent.

Acheter : http://www.academon.fr/Mémoire-ou-thèse-La-finance-islamique-et-l'immobilier-en-France/12403

Finance islamique et immobilier : à télécharger

http://www.herbertsmith.com/NR/rdonlyres/2724ED2A-2F84-4362-B6E2-A3F5B147470B/0/ClubPierre_n16_171208.pdf

Finance islamique et immobilier : enjeux et opportunités

Organisé par le Cabinet juridique Herbert Smith, le « Club Pierre » est une manifestation bimestrielle qui a vocation à informer les professionnels de l’Immobilier sur les évolutions juridiques et fiscales propres à leur domaine d’intervention sur un sujet d’actualité.
Support de l’édition « Club Pierre » organisée en décembre 2008, le document ci-après présente les applications de la finance islamique dans le secteur immobilier, dont il passe notamment en revue les principes, les techniques et les implications légales et financières.
Téléchargement sur : http://ribh.wordpress.com/2009/07/02/club-pierre/
Source : http://ribh.wordpress.com/2009/07/02/club-pierre/

Banque islamique : mode d'emploi

Entretien avec Imane Karich, spécialiste du système financier islamique

La finance islamique vous intéresse mais vous n'en saisissez pas toutes les subtilités ou des termes la caractérisant ne vous parlent franchement pas. Saphirnews a posé quelques questions pour vous éclairer à Imane Karich, spécialiste de la finance islamique et auteur d'un ouvrage intitulé "Finances et islam" (Le Savoir, 2004). Entretien.


Saphirnews : A quoi correspondent les différents instruments de la banque islamique ? (mourabaha, moucharaka, salam, moudaraba, ijara)

mane Karich : La Mousharaka et la Moudharaba sont les deux produits de base de la finance islamique car basés sur le principe de partage des pertes et profits. Ce sont des contrats de participation qui mettent en relation deux parties. 
Dans la moudharaba, l'une des parties apporte les fonds (Rab al Mal) et l'autre partie apporte son savoir (entrepreneur). Le profit du contrat n'est pas déterminé et dépend de l'activité du projet. Seule la quote part, c'est-à-dire la manière dont ce profit sera divisée entre les parties, doit etre prédéfinie dans le contrat. 
Dans la mousharaka, les deux parties s'associent en apportant chacune tant les fonds que leur expertise. Le profit éventuel est partagé selon leur apport financier. 

La Murabaha est une forme particulière de contrat de vente d'un bien réel (tout bien sauf l'argent qui n'a pas de valeur réelle). Le vendeur octroie une facilité de paiement à l'acheteur. Cette facilité doit être définie dans le contrat, et l'acheteur connaît le prix d'achat du bien et négocie avec le vendeur la marge bénéficiaire. 

Le contrat de ijara est un contrat de location. Aujourd'hui, il est associé à un contrat de vente qui vient s'ajouter en fin du contrat de location. Ceci est alors équivalent au contrat de leasing contemporain.

Concrètement, que peut faire un musulman européen qui souhaiterait acquérir un bien immobilier tout en respectant ses principes islamiques ?

I. K. : Je ne connais pas la situation de la France, mais en Belgique, les possibilités d'acquisition immobilière conformes aux principes de l'Islam sont aujourd'hui limitées. 
Soit il faut faire appel à un crédit conventionnel en se basant sur la fatwa du majliss européen, qui est très contestée, soit faire appel à une vente en viager, sous la condition que la période de remboursement soit prédeterminée dans le contrat ( et ne pas dépendre de la mort de la partie vendeuse). Cependant, il peut être stipulé dans le contrat que si le vendeur décède avant la fin de cette période, le vendeur annule la dette de l'acheteur. 
De plus en plus de personnes font appel à la tontine : système qui permet à un ensemble de personnes de mettre en commun une certaine somme sur une période définie et à une fréquence définie. Chaque personne a droit à tour de rôle à la somme totale.

Quelles possibilités de placements financiers offrent les banques islamiques ?

I. K. : Il existe diverses formes de placement financier actuellement. Principalement via des fonds de placement. Autrefois essentiellement composés uniquement d'actions, ils sont de plus en plus sophistiqués et certains permettent par exemple de protéger le placement initial, tout en restant conformes aux principes islamiques. 

Quels sont les principes fondamentaux régissant la finance islamique ?

I. K. : L'équité, la justice sociale et la participation des différentes parties. Le rejet de toute source de création de richesse injustifiée, dont l'intérêt, car l'argent n'est pas un bien que l'on peut vendre, acheter ou sur lequel on peut donner un prix. 
Enfin, l'interdiction du gharar : éviter dans un contrat qu'il n'y ait des éléments flous, inconnus, ou dépendants d'un événement ultérieur. 

Enfin, que sont les Shariah Board ?

I. K. : Les sharia board sont la particularité des banques islamiques : ce sont des comités indépendants de savants versés tant dans la finance que dans les sciences religieuses et qui contrôlent la conformité de l'organisation de la banque, de ses produits, techniques, etc., aux principes islamiques. Ce contrôle est continu, à l'initiation du contrat mais également durant toute sa durée de vie.

Source : http://www.saphirnews.com/Banque-islamique-mode-d-emploi_a8676.html

jeudi 9 décembre 2010

Des accords des autorités en Algérie

Article paru dans Le Maghreb
Le président de la COSOB, M. Smaïl Nordine reconnaît que son institution " a donné en 2010 un visa pour Alliance-assurances et un autre Maghreb leasing Algérie (MLA) qui appartient à un investisseur étranger pour la levée d'un emprunt obligataire de deux milliards de dinars et ouvrir le capital après en s'engageant de rentrer en bourse en 2011. L'opération est en cours et est garantie financièrement par des établissements financiers algériens ". Quant au débat à propos de la finance islamique, le président de la commission de surveillance des opérations en Bourse pense " qu'actuellement c'est un sujet en débat qui a été entamé. En Algérie, il y a deux banques, Al Baraka banque et Salam qui exploitent ce créneau " et de reconnaître qu' " Il y a une demande ici en Algérie et c'est ça qui suscite l'intérêt des operateurs, seulement il faut que ça soit réglementé " et qu'en dépit du non achèvement du droit boursier en matière de fiscalité " il faut savoir que ce n'est pas du tout un tabou ". D'ailleurs, déclara-t-il, " en commission ça été discuté à deux reprises et appuyé par des documents administratifs et tous les membres sont unanimes pour dire Oui il faut continuer à discuter avec la banque centrale, avec la direction générale du trésor public etc.…". Les petits porteurs ainsi que les porteurs moyens préfèrent garder leur argent en le thésaurisant plutôt que de recourir au système financier et bancaire se heurtant au côté religieux qui interdit le recours à ce genre de pratique mais que beaucoup de banquiers européens ont pu contourner sans toucher au caractère sacré de la chose ni aux principes cultuels de leurs clients qui représentent une manne fabuleuse. Aux banques de prendre l'argent là oû il se trouve, semble être la devise du monde de la finance.

Source : http://www.financeislamiquefrance.fr/actualites-internationales.php#veille_1196

Les membres du Conseil de la nation en Algérie en discutent

Les membres du Conseil de la nation ont entamé dimanche l’examen du texte de Loi de finances (LF) 2011 présenté par le ministre les Relations avec le parlement, Mahmoud Khedri, lors d’une séance plénière présidée par Abdelkader Bensalah, président du Conseil.
A cette occasion, plusieurs membres ont également appelé à prendre les mesures juridiques permettant d’adopter la finance islamique, soulignant que "les prestations financières islamiques sont sollicitées particulièrement dans les secteurs de l’industrie, des services et de l’immobilier".

Source : http://www.financeislamiquefrance.fr/actualites-internationales.php#veille_1196

Après Yaqubi, Al Qari s'exprime sur la limitation du nombre boards

Seule la Banque Centrale de Malaisie limite le nombre de shariah boards avec un conseil qui est centralisé, tandis que les Emirats Arabes Unis ont introduit un plafond dans le secteur de l'assurance cette année.
Alors que Sheikh Nizam Yaqubi, le shariah scholar réputé s'est exprimé auparavant, c'est au tour de Mohamed El Gari, de rejeter l'effort de limiter le nombre de comités dans lesquels peut siéger un jurisconsulte.
« Je ne crois pas que ce soit très souhaitable si nous restreignons l'appartenance à des shariah boards a seulement un... si le membre lui-même n'est pas qualifié », a-t-il déclaré.
« Ce savoir qui a été accumulé par un petit nombre de personnes peut parvenir de la première à la deuxième génération à travers l'apprentissage. » Pour lui, le simple fait d'être diplômé d'un programme shariah n'est pas suffisant pour être qualifié à conseiller dans un shariah board, et les scholars juniors ont besoin d'apprendre de leurs collègues seniors jusqu'à ce que des programmes de formation formels soient établis.

Source : http://www.financeislamiquefrance.fr/actualites-internationales.php#veille_1196

lundi 6 décembre 2010

Tunisie : Banque Zitouna vise un nombre de 120 agences à l’horizon 2014

«Finances Islamiques, quelles réponses pour quels défis ?», tel est le thème de la Journée Finances organisée, le 4 décembre 2010, par la Jeune Chambre Internationale (JCI- Tunis).
L'objectif primordial de cette manifestation est de rendre accessible la notion de finance islamique et de partager les connaissances afin d'enrichir le dispositif bancaire du pays, et ce en ouvrant un dialogue entre banquiers, professionnels, universitaires et hommes d'affaires.
La journée Finances a été riche en informations, et surtout en renseignements sur l’expérience de la Tunisie en finances islamiques. La Tunisie a été l’un des pays pionniers qui a mis en place une panoplie des mécanismes de financement islamique, dès 1975, afin de conformer les opérations bancaires et commerciales aux préceptes coraniques. Elle a, également, été parmi les pays pionniers à faire partie des membres fondateurs de la BEST Bank, sous la loi off-shore en association avec Dallah Al Baraka. Les institutions spécialisées en finance islamique ont financé d’importants projets, tels le projet de construction de toute la région du Lac, à Tunis, dont les financements sont en formule Mourabaha, en d’autres termes une convention de Financement Participatif entre l’Etat Tunisien, Al Baraka, et la Société Promotion du Lac de Tunis.
En outre, la Tunisie œuvre à mettre en place une plateforme moderne, compétitive et attractive à même de favoriser son émergence en tant que pôle exportateur de services et place financière régionale. Ce qui impose de déployer plus d’efforts afin d'améliorer la compétitivité de l'économie, à accompagner les entreprises et à consolider le rayonnement de la Tunisie sur le plan régional.
Ainsi, l’implantation de la banque universelle, «Banque Zitouna» a donné sa pleine mesure à la finance islamique sans pour autant s’inscrire dans une logique concurrentielle avec les autres banques. Cette Banque comprendra, courant 2010, 25 agences reparties sur tout le territoire tunisien pour atteindre 120 agences à l’horizon 2014. Elle assurera une accessibilité équitable à ses produits et services et proposera les meilleures solutions à ses clients, en anticipant et en innovant, avec 320 employés et environ 15 000 clients.

Éthique et finance en Islam

Isabelle Chapellière Agrégée de Sciences Sociales, Docteur en Sciences économiques,Isabelle Chapellière enseigne l'économie à Aix-en-Provence. Auteur d'une thèse sur l'islam et la rationalité économique, ayant enseigné à l'Université Galatasaray d'Istanbul, elle s'est intéressée à la finance islamique, particulièrement en Turquie, dans ses aspects économiques et géopolitiques. Elle est également l'auteur d'ouvrages sur la protection sociale et le changement social.


Le livre Éthique et finance en Islam d'Isabelle Chapellière (Ed. Koutoubia) est un ouvrage complet qui permet de mieux comprendre les enjeux économiques et politiques de la finance islamique. Dans cet entretien à Oumma.com, Isabelle Chapellière, revient notamment sur l’origine historique de cette finance, ses grands principes et l’intérêt qu’elle suscite auprès des gouvernements européens, notament en France.
Peut-on situer historiquement l’apparition de la finance islamique ?
La finance islamique, dans sa forme contemporaine, est apparue avec la création de la Banque Islamique de Développement (B.I.D.) en 1975, décidée au sommet de l’Organisation des Etats islamiques de Lahore en 1974. A la fin des années 1970 et au début des années 1980, avec l’afflux des pétrodollars, de nombreuses banques islamiques sont apparues dans le Golfe et en Arabie Saoudite (Koweit Finance House, DMI, Al Baraka…). A partir des années 2000, la finance islamique connait un tournant avec la volonté des pays musulmans de rapatrier leurs capitaux hors des Etats Unis et l’épargne massive de pays émergents comme la Malaisie. Son implantation dépasse alors les pays musulmans : des « guichets » islamiques sont créés dans des banques conventionnelles, des banques islamiques s’installent en Europe, principalement en Grande-Bretagne…
Même si on met l’accent sur le boom récent de la finance islamique, la 1ière expérience de banque islamique a eu lieu à partir de 1962, en Egypte, à Mit Gham, par la création de caisses d’épargne rurale, sur le modèle allemand d’après 1945, avec 3 spécificités : l’absence d’utilisation d’intérêt, la collecte de la zakât et la volonté de favoriser épargne populaire et développement économique.
Si l’on raisonne en termes de pratiques financières islamiques, on pourrait remonter à l’époque de Mahomet pour observer la mourabaha, relation de partenariat associant un investisseur apportant le capital et un commandité qui fait fructifier, avec partage des profits et pertes. L’origine des pratiques financières islamiques remonterait alors à près de 1500 ans.

Vous opérez une distinction entre la philosophie économique de l’islam et la question de l’existence d’un système économique islamique ?
La philosophie économique de l’islam est une morale, une éthique, proposant des prescriptions qui guident le comportement en précisant ce qui licite, halal, recommandé et ce qui est proscrit, haram. Il est possible d’élaborer, à partir du Coran, de la Sunna et des interprétations, une conceptualisation de ce que serait une économie islamique conforme à des valeurs. Il est en effet difficile de transposer directement l’analyse d’une société musulmane originelle pastorale et agricole aux sociétés capitalistes actuelles.
Il n’existe, de nos jours, aucune application globale d’économie islamique, même dans des pays ayant islamisé leur système bancaire comme le Pakistan, l’Iran ou le Soudan. Aucun régime économique alternatif au capitalisme et au socialisme n’a été mis en place. Plutôt que dans les structures macroéconomiques des pays musulmans, il faut rechercher la conformité à l’islam dans les comportements microéconomiques des acteurs musulmans.
La morale économique dans l’islam est-elle comparable aux deux autres religions monothéistes ?
Il existe de nombreux points communs entre la morale économique des trois religions monothéistes. Citons en quelques-uns. Par le sens du bien-être collectif, les trois religions prônent la solidarité envers les plus pauvres, même si l’islam va plus loin avec la zakât, qui restitue au pauvre ce qui lui revient. La monnaie n’a aucune valeur en soi et ne doit pas faire l’objet de spéculation, comme le disait déjà Aristote et Thomas d’Aquin. L’usure est condamnée explicitement dans les trois religions. Son interdiction est mentionnée aussi bien dans l’Ancien Testament, dans la Bible que dans le Coran.
La loyauté et l’honnêteté est obligatoire dans les contrats. Comme chez Aristote, le temps appartient à Dieu et ne doit pas faire l’objet de transactions commerciales. Seul le travail justifie l’enrichissement, comme chez les Calvins étudiés par Max Weber. On trouve néanmoins dans l’islam l’accent mis davantage sur la communauté que sur l’individu. Toute relation économique est autant un pacte, un contrat, entre les membres de la communauté qu’entre ceux-ci et Dieu.
L’islam induit-il des comportements économiques spécifiques ?
On ne peut pas définir un homo oeconomicus musulman spécifique ; néanmoins, on peut parler d’une vision du monde qui est influencée par l’histoire, les caractéristiques sociales, les normes et valeurs sociales, influencée en partie par la religion pour le croyant. Un musulman pratiquant rationnel, d’un point de vue sociétal, respectera dans ses actes économiques des valeurs et consommera des produits halal, investira dans une logique du partage des risques, ne spéculera pas, sera loyal dans les affaires… Ceci n’entre pas en contradiction avec la recherche d’une rationalité économique en finalité : satisfaire le mieux possible ses besoins ou faire des profits. La recherche du bien-être individuel ne s’oppose pas à celle du bien-être de la communauté.
Quelle est la définition exacte du mot ribâ et le sens de son interdiction ?
Difficile à traduire, ribâ, qui signifie « augmenter », peut être interprété selon un sens plus ou moins restrictif, comme : Usure, intérêt excessif « porter de double en double », Tout intérêt calculé au préalable sur un capital initial prêté, Par extension, toute relation d’exploitation économique d’un individu en position dominante par rapport à un autre. Le sens de son interdiction est à la fois spirituel et moral : ne pas jouer sur le temps, ne pas exploiter celui qui est dans le besoin, ne pas spéculer dans une activité non productive, sans lien avec le travail, ne pas dévier de la justice sociale, ne pas renforcer la concentration des revenus entre les mains des plus riches…
Quels sont les grands principes qui régissent la finance islamique ?
On peut dégager 5 principes essentiels :
L’interdit de l’intérêt fixe et garanti et son remplacement par un partage des profits et pertes entre apporteurs de capitaux (banques, investisseurs) et de travail (entrepreneurs) ;
L’interdit du gharar, incertitude, risque, tromperie, ce qui impose une transparence des contrats ;
L’interdiction de la spéculation, maysir ;
L’adossement à un actif tangible de toute opération de prêt, el liaison avec la conception de la monnaie, du travail et du partage du risque ;
L’exclusion de certains secteurs d’activité comme l’alcool, l’armement, les jeux, la pornographie, la production de porcs…
Quelle est la place de la finance islamique dans la finance mondiale ?
Actuellement, on estime la finance islamique à près 800 milliards d’€ actifs, mais davantage que sa part en valeur absolue, qui reste modérée par rapport à la finance conventionnelle, il faut considérer sa croissance forte de 10 à 15% en moyenne annuelle. De plus, son implantation se diffuse à de nombreux pays, musulmans (Golfe Persique, Malaisie, Maghreb, Indonésie) ou non (Angleterre, Allemagne et en 2011, en France). Plus de 300 banques islamiques sont présentes dans le monde et de nombreuses banques conventionnelles créent des « guichets islamiques ». La finance islamique comprend, en plus de la banque islamique, l’assurance (takafol). Les perspectives de croissance du secteur sont donc fortes.
Vous donnez, dans votre livre, l’exemple de la Turquie qui représente une intégration rapide au système financier global.
Les premières banques islamiques sont apparues en Turquie dès 1983, avec la création de filiales des groupes saoudiens Al Baraka et Faysal Finans, puis l’implantation de la Kuveyt Türk. Dans ce pays de Constitution laïque, comme la France, elles ont d’abord mis l’accent sur l’absence de pratique de l’intérêt et sur la dimension participative, avec un statut particulier de « sociétés de finance spéciale ». A partir des années 1990, sont apparues des banques islamiques à capitaux locaux, Anadolu Finans, Ihlâs Finans (actuellement disparue) et Asya Finans.
Aujourd’hui, ces banques islamiques turques, après des restructurations, se présentent comme un segment encore restreint, mais elles ont pu prouver, ces dernières années, leur capacité à résister aux crises financières nationales et internationales et à s’intégrer dans le système financier global. Elles gardent leur dimension participative, tout en ayant adopté le statut de banques, en étant soumises aux mêmes législations que les banques conventionnelles et en conservant une spécificité : celle d’opérer, a priori, sans utiliser l’intérêt et sans remettre en cause le principe de laïcité cher à la Constitution turque. Ceci constitue un prototype intéressant pour l’implantation de la finance islamique dans un pays comme la France, que j’étudie en temps que tel dans mon ouvrage.
Quels sont les obstacles à l’expansion des banques islamiques ? La finance islamique doit proposer de produits financiers
d’investissement et d’épargne conformes à ses objectifs premiers. Ceux-ci doivent être à la fois innovants, performants et présenter une grande transparence. Elle doit faire un effort de standardisation, qui est déjà engagé avec l’harmonisation des normes juridiques et comptables. Des obstacles politiques et institutionnels sont aussi présents, mais on peut considérer qu’ils sont en voie d’être levés en France avec les derniers aménagements fiscaux et juridiques d’août 2010, rendant la finance islamique plus compétitive. Enfin, l’offre universitaire est encore limitée pour former des professionnels de la banque islamique, même si des universités prestigieuses, comme Paris-Dauphine, proposent maintenant des formations de haut niveau.
Comment expliquez-vous l’intérêt que portent certains gouvernements européens, notamment la France, pour la finance islamique ?
2011 verra l’émission en France des premières obligations islamiques, les sukuks. Dans un contexte de besoins importants de liquidités, la finance islamique peut être le moyen de financer des projets d’investissements de grandes entreprises (Total l’a déjà utilisée), de financer les projets des collectivités territoriales (le « Grand Paris », par exemple) par l’apport de capitaux issus des pays du Golfe notamment. Les 5 millions de musulmans présents en France pourraient constituer un marché de détail important pour des banques islamiques pour financer l’investissement immobilier des ménages et celui, productif, des petites entreprises, mais il semble que les gouvernements considèrent d’abord l’atout de cette manne financière dans la situation actuelle d’endettement massif des Etats et des collectivités locales.
Selon vous, la finance islamique peut-elle donner, en période de crise financière, une dimension morale au capitalisme ?
Christine Lagarde avait affirmé lors de l’ouverture du G20 en 2008 que « la finance conventionnelle doit s’inspirer des principes de la finance islamique » pour limiter les risques systémiques et les crises financières violentes telles que celle dite « des subprimes » qu’ont connue les Etats Unis et l’Europe. La spéculation, la titrisation à outrance n’auraient pas pu avoir lieu dans un modèle de finance qui impose aux banques le partage des risques, qui remet l’activité productive et l’économie réelle au cœur du système. C’est en cela que la finance islamique, dans ses principes et ses sa dimension éthique et solidaire peut servir de modèle d’inspiration pour redonner une dimension morale au capitalisme, le « civiliser » et repenser le capitalisme financier.

Source : Livre : Ethique & finance en islam ecrit par Isabelle Chapellière

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